lundi 1 janvier 2018

JEU 32 : Un dimanche des familles

 



- Sors de cette salle de bains! crie le père. Nous aussi on doit encore se laver et s'habiller!
Elle se retient de lui répondre "quand les poules auront des dents", seule la mère a le droit d'utiliser cette expression. Devant le miroir, elle s'entraîne à embrasser un garçon. Pour ça, elle a choisi un portrait d'Arthur Rimbaud, parce qu'elle le trouve si craquant, avec sa mèche rebelle, ses yeux clairs et sa cravate mal nouée. Le genre de mec pour qui on décrocherait la lune.
- C'est pas un peu fini, oui? crie le père, au moment où elle sort avec Arthur caché sous son pull. Qu'est-ce que tu as fabriqué pendant tout ce temps?
- Ben, je me lave, moi!
Argument imparable dans une maison où l'hygiène prend une place si importante dans l'échelle des valeurs.
Il aimerait bien, le père, que les diverses obligations matinales se succèdent en bon ordre, ça devrait "être réglé comme du papier à musique", et il le répète assez, mais il y a toujours quelqu'un qui reste trop longtemps sous la couette, ou à table, ou dans la salle de bains.

Une demi-heure plus tard, le père gare sa voiture à côté du parc que toute la famille traverse pour se rendre à l'église. Devant la statue "du monsieur tout nu", le petit frère fait ses grimaces habituelles, suivies d'un "c'est fini, oui?" impatient du père, qui ne peut s'empêcher de rigoler.

Après la messe, le père va au café pendant que le reste de la famille fait sa visite dominicale à la grand-mère, celle qui est veuve et souvent "dans le trou", on ne sait pas très bien ce qu'elle veut dire mais on devine que ce n'est pas joyeux, "dans le trou".

Puis on rentre chez soi, et ça finit souvent en discussions "c'est toi qui as la clé", "mais non, c'est toi!", "c'est toi qui as fermé la porte en partant", "oui mais je te l'ai donnée, la clé!".

Bref, un dimanche des familles.

 
 

2 commentaires:

  1. Ah, mais...j'ai presque l'impression de la connaître, cette famille...en quelques mots, tu nous a brossé de jolis portraits, criants de vérité !
    Bravo !

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  2. Les souvenirs de dimanches poisseux en famille me remontent...
    Surtout les visites chez les vieilles parentes...
    bravo Adrienne !
    ¸¸.•*¨*• ☆

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